Cyrano - Le bel hommage d'une spectatrice...
Souffrez monsieur Clément qu’aujourd’hui je vous dise
Tout le bien que je pense de la noble entreprise
Qui vous vint à l’esprit comme d’autres la bêtise.
Car enfin il faut bien être déraisonnable
Pour décider un jour de monter cette fable !
Vous dûtes par la queue vingt fois tirer le diable
Et bagarrer beaucoup avec quelques notables.
L’argent mis de côté, il vous restait encore
Un Nez à dénicher comme on cherche un trésor.
Au bout du Nez un homme qui ne soit point parjure
Et ne s’abaisse pas à la caricature.
Il eut été facile de singer quelques grands,
Mais c’eut été faire preuve de bien peu de talent.
Oublier Depardieu et quelque autre Jean Piat
Etait une gageure ; rien ne vous arrêta.
Il vous fallait un homme qui ne fût point trop sot
Pour nous donner à voir un autre Cyrano.
Un comédien malin, talentueux et sensible
Plein de fougue rageuse, de douceur indicible.
Il fallait qu’il fût vrai, qu’il fût plus que plausible,
Et vrai il l’a été, au-delà du possible.
A tel point que je doute que son nez fût un faux
Tant il s’accordait bien à la beauté des mots.
Que pourrais-je ajouter que d’autres n’ont pas dit ?
Que l’écrin de la scène était fort bien choisi ?
Les lumières, les décors, la grâce, le souffle épique
Tout à dessein servait le bonheur du public.
Et chaque comédien et chaque figurant,
Roxane l’insatiable, le malheureux Christian,
La malicieuse sœur, les Gascons turbulents,
Le pâtissier poète et l’ivrogne émouvant
N’ont point lieu de rougir devant monsieur Rostand
Qui du fond de sa tombe doit être fort content.
Si mes alexandrins vous semblent ridicules
Ils ne sont affublés d’aucune particule.
Ne lirez point ici de basses flatteries
Qu’il est d’usage d’ouïr à la cour de Paris.
Mes mots sont roturiers, de basse condition
Mais ils savent comme d’autres, dire mon admiration.
S’ils se donnent la peine d’un joli habillage
C’est dans l’humble intention de rendre bel hommage
A ce qui me donna plaisir… et davantage.
En matière de théâtre je suis peu érudite
Mais j’aime la manière dont les choses sont dites.
Ma sœur de « Montserrat » m’a vanté les mérites,
J’irai vous applaudir au jour et à l’heure dite.
Bravo monsieur Clément pour vos entêtements
Contagieuse passion et projets exaltants.
Merci à l’Ourson Blanc de défendre ardemment
Une certaine idée du spectacle vivant.
Respectueusement
Patricia Lardeux